habitant d'un hameau des Cévennes montagnardes, depuis que j'y suis né, dans le département de la Lozère. La ferme est située sous les crêtes du Signal du Ventalon au dessus de la Vallée Longue, l'une des trois grandes vallées schisteuses escarpées de "la Cévenne des Cévennes" chère à Chabrol. La présence humaine y est rare, les habitats dispersés. Sur la commune aucun centre-bourg ou place de village. Ce massif méditerranéen aux versants abrupts souvent inaccessibles, est recouvert de châtaigneraies, de chênes verts ou de boisements plus récents de conifères. Quelques micro-hameaux isolés se sont accrochés là depuis plusieurs centaines d'années, entourés de courtes terrasses en pierres sèches, cultivées ou abandonnées.
L'activité agricole avait cessé dans ce petit hameau vers la fin des années 60.
Arrivés ici en 1984, mes parents ont commencé par défricher la propriété autour de l'habitation, totalement en ruine, en dehors d'une bergerie à l'état brut, âgée de plus de trois cent ans. Leur projet agricole a démarré presque aussitôt en parallèle, accompagné par mon arrivée au monde puis celle de mon frère, évidemment avec son lot d'incommodités, d'inconfort et d'aventures pendant les quelques années de démarrage. Apiculture, élevage, transformations du lait en fromages, des fruits, des cueillettes et des châtaignes en confitures, se sont développés. Peu-à-peu l'attrait touristique pour ces coins reculés a permis de trouver quelques débouchés qui n'étaient pas acquis au départ. Pour tenir, quelles étaient leurs motivations ? Probablement surtout l'envie de fuir le consumérisme aveugle de l'époque qui offrait des carrières tout en éloignant du sens et des autres voies possibles.
Après avoir suivi une formation agricole spécialisée en apiculture à Nîmes en 2010 (BPREA), puis des stages auprès de professionnels, et conforté par quelques années d'expérience pratique, j'ai choisi les abeilles à la suite de mon père et de mon grand père, apiculteur amateur passionné. Lui veille encore à sa façon ; il avait ouvert une voie vers notre compréhension du merveilleux peuple des abeilles.
J'ai souhaité rester dans mes montagnes de la Lozère cévenole où je me sens bien. Je suis apiculteur à titre principal depuis quelques années maintenant. Auparavant, j'avais une formation de charpentier ossature bois et une pratique du métier dans ce domaine, encore très utiles aujourd'hui ; en pleine montagne, loin de tout commerce, les compétences mises bout-à-bout sont précieuses si l'on veut éviter les pertes de temps inutiles en déplacements.
Après l'élevage des reines tôt au printemps permettant le renouvellement des colonies d'abeilles, j'installe mes petits ruchers en montagne, principalement dans les basses et hautes vallées en Lozère Sud, près des floraisons successives, en transhumant jusqu'à la fin de l'été, la plupart du temps à moins d'une heure de route de ma miellerie. L'hivernage des ruches a lieu ensuite au sud, dans les Garrigues du Piémont Cévenol, où grâce à des températures plus douces, la végétation y est plus précoce qu'en altitude. L'hiver sera consacré à la remise en état des ruches, au nettoyage et au remplacement des vieux cadres de cire, à la préparation du matériel pour la prochaine saison ainsi qu'à l'entretien des ruchers. Il faut également consacrer toute l'année le temps nécessaire à la commercialisation du miel et à la gestion des papiers administratifs habituels... un métier aux multiples facettes, avec une part non négligeable d'aspects techniques, et très dépendant des conditions météorologiques. Ici les épisodes d'été, chauds et secs, ou certains printemps froids, pluvieux ou ventés, réservent des surprises différentes chaque année, avec pour résultat des écarts de récoltes qui peuvent être importants.
L'apiculture est ma seule source de revenu.
2019, 2020 et 2021 ont été consacrés à l'aménagement provisoire et à l'équipement d'une miellerie plus spacieuse et fonctionnelle, ainsi qu'à la mise au point d'une petite grue de levage, une aide précieuse, même si la configuration montagneuse du terrain contraint les manipulations. Souvent les ruches et les hausses lors des transhumances et des récoltes, sont levées, chargées et déchargées manuellement avec l'aide d'autres apiculteurs, amis ou famille.
La prochaine étape est la construction d'un hangar de stockage du matériel, avec un espace mieux adapté pour la miellerie.
Je possède aujourd'hui 300 ruches. Je continue d'augmenter chaque année le nombre de colonies de manière à atteindre d'ici un à deux ans un effectif d'environ 400 ruches.
Un Oeuf, pondu par l'unique reine de la colonie, ne deviendra à son tour une reine que si la larve est nourrie de gelée royale.
La reine est fécondée une seule fois au début de sa vie, pendant sa lune de miel avec les "faux-bourdons".
Les cellules des cadres, une fois remplies de miel une à une, sont recouvertes par les abeilles d'une mince pellicule de cire qui protègera le miel de l'humidité ou de toute dégradation, en attendant d'être consommé en cas de besoin.
Le ramassage des châtaignes complète les interventions de fin de saison au rucher. Il commence juste après les transhumances des dernières ruches pour l'hivernage. Les châtaignes sont transformées ensuite en confitures. Le nettoyage et l'entretien de la châtaigneraie a lieu au cours de l'automne et de l'hiver.